mardi 12 février 2019

LA PROBLEMATIQUE DES MAISONS ABANDONNEES A POINTE-A-PITRE



L’incendie de la rue Peynier pose une nouvelle fois la question des maisons abandonnées par leur propriétaire dans le centre-ville et les dangers qu’elles font courir.

La ville consciente de cet handicap a développé une politique d’acquisition de parcelles par des DUP (Déclaration d’Utilité Publique) dans le cadre de la rénovation urbaine et avec l’EPF (Etablissement Public Foncier) en développant sur ces parcelles de l’habitation sociale et des commerces. 
Près de 100 parcelles ont été ainsi acquises et permettent la reconstitution d’une offre de près de 200 logements qui contribuent à ramener de la population en centre-ville.

Cette action s’ajoute aux opérations d’OPAH-RU qui ont redémarré et qui permettent aux propriétaires de rénover leurs biens avec une aide substantielle de l’Etat (ANAH) et de la ville (près de 150 opérations de ce type ont déjà eu lieu). Mais l’amplification des politiques publiques pour gagner la bataille contre le temps et la dégradation des biens non entretenus se heurte cependant à 4 grandes difficultés qu’il faut avoir à l’esprit.

1°) L’abandon et le non entretien d’un nombre important de propriétés pendant des années crée des risques de squat, d’incendies, mais aussi des sources de nuisance pour le voisinage (arbres non taillés, dépôts d’ordures, rongeurs…).

2°) L’indivision règne sur la plupart des parcelles concernées. Il faut quelquefois des dizaines d’années pour gérer les successions. Les opérations que nous faisons par exemple face au Tribunal pour acquérir les parcelles et développer des espaces publics nous obligent à remonter au IXème siècle pour reconstituer les propriétés et affronter des dizaines d’héritiers par parcelle dont nombreux n’ont pas ou n’ont plus les titres de propriété.

3°) La spéculation autour du bien qui a été au départ de l’incendie (maison dite ROMIL), non entretenu depuis plus de 30 ans, faisait l’objet d’une vente à un prix qui a découragé tous les acquéreurs potentiels qui se sont présentés pour l’acheter, l’entretenir ou l’embellir. Dans la même rue, une propriété classée de l’Etat fait courir le même risque (non entretien et demande de sommes peu raisonnables pour son acquisition). Beaucoup de bâtiments remarquables du centre-ville sont victimes de ce double effet : absence d’entretien mais volonté d’en tirer des bénéfices importants.

4°) Quand des accords sont trouvés entre des propriétaires et des acheteurs (privés ou publics) les contraintes liées à la proximité de nombreux bâtiments classés viennent compliquer la tâche pour leur rendre un usage d’habitation moderne, d’espace économique ou de service public. Les exigences formulées quelquefois de réhabilitation à l’identique sont peu réalistes. Nous nous félicitons cependant que sur certaines opérations (rue Achille René-Boisneuf par exemple) des d’accords entre les bailleurs et les architectes des bâtiments de France ont pu être trouvés pour des démolitions complètes avec reconstruction des façades à l’identique. Sans de tels accords, certains bâtiments risqueraient de continuer de se dégrader jusqu’à leur disparition.

La lutte que nous menons pour préserver le patrimoine de la ville est donc un combat acharné et délicat. Les progrès que nous faisons sont à tout moment remis en question d’une part, par les dégradations du temps et les risques d’incendie, de cyclones ou de tremblement de terre et d’autre part, par les évolutions potentiels de la législation. Mais nous continuerons ce combat, car il est ô combien pénible de voir notre patrimoine architectural partir en fumée…

S’agissant de la maison de la famille FORIER, il y a certainement des pistes qui permettraient de reconstruire à l’identique ce patrimoine culturel et cher aux pointois. Le moment venu, les propriétaires pourront s’ils le souhaitent se rapprocher des services compétents de la ville, prêts à les accompagner pour entamer des démarches dans ce sens.

Le Maire de Pointe-à-Pitre,
Dr Jacques BANGOU