C'est curieux, mais normal. N'importe quel peuple marginalisé, banni, honni, esclavagisé, sali, comme l'ont été les noirs, se comporteraient de la même manière. Il aurait du mal à croire qu'il est l'égal des autres ; il aurait du mal à se convaincre que ses propres ancêtres ont été à l'origine d'une des plus grandes civilisations au monde - la civilisation égyptienne en l'occurrence. Comment y croire lorsqu'on a subi un tel déclin ? Comment y songer lorsqu'on a été classé par ceux qu'on appelle les GRANDS intellectuels, dernier de la classe ? Comment y croire lorsqu'on vous a dit sur plusieurs générations que vous êtes le peuple le moins intelligent, le moins créatif, le plus bête et le plus proche des singes ? Comment y croire lorsque pendant des décennies l'on a pensé à travers l'autre, acquis le sens du bien et du mal selon l'autre ? Comment y croire, lorsque pendant près de cinq cents ans , seul a prédominer le prisme de l'Autre ?
Il n'est pas question ici, de s'enorgueillir du passé égyptien, de s'en vanter comme le font certains sans rien produire de nouveaux et de dormir sur ces lauriers si lointains ! Non, il s'agit tout simplement de savoir, de connaître tout simplement ce qui a été et ce qui pourrait advenir. Il s'agit tout simplement d'en avoir conscience pour mieux avancer et mieux se situer par rapport aux autres !
Quand je vois la fougue avec laquelle certains Africains défendent des églises, quand je vois combien certains d'entre nous sont prêts à mourir pour des religions dont nous n'avons pas la maternité, je m'interroge. Et certains de raconter tout le bien que leur fait tel ou tel prophète... Si ce Dieu prié par les Africains ainsi que leurs égrégores nous appartenaient, je crois fort que l'homme noir ne serait plus aux pleurnicheries et aux souffrances. Si ces égrégores devant lesquels nos pères, mères, frères et soeurs étaient en adéquation avec nous, tout irait pour le mieux.
Il ne s'agit pas pour moi de demander aux gens de ne point croire, mais de choisir en toute connaissance de cause en quoi croire, car la spiritualité est nécessaire à la grandeur de l'homme.
Calixthe Beyala
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