Procès de Sakina Arnaud à Bordeaux : le racisme était bien là, mais pas du côté de la prévenue… - CAPJPO-EuroPalestine: "Procès de Sakina Arnaud à Bordeaux : le racisme était bien là, mais pas du côté de la prévenue…
Par CAPJPO-EuroPalestine
Si la Cour d’Appel de Bordeaux a bénéficié vendredi de débats parfois très pointus au plan juridique, elle a aussi été le théâtre de méthodes carrément racistes, à l’encontre de la prévenue, Sakina Arnaud, poursuivie pour avoir apposé un autocollant « Boycott Apartheid Israël » sur une bouteille de jus de fruit censément « made in Israel ».
Sakina avait été condamnée à 1.000 € d’amende au début de l’année, pour ce fameux autocollant, au nom de l’article 24 alinéa 8 de la loi sur la presse (dite « loi de 1881 ») réprimant « l’incitation à la haine raciale ». Jugement mis en appel par Sakina.
Le procès de Sakina Arnaud est l’un des tout premiers en France, sinon le premier, dans le cadre de l’alliance entre le gouvernement français et Israël pour tenter d’étouffer le vaste mouvement citoyen qui se développe dans le monde entier sous le sigle BDS (Boycott Désinvestissements Sanctions).
Les agitateurs du lobby israélien en France, comme l’inénarrable Sammy Ghozlan ou l’avocat extrémiste Goldnadel, se vantent ainsi d’avoir déposé à ce jour une centaine de plaintes contre des militants de la solidarité avec le peuple palestinien, la dernière en date étant particulièrement grotesque et odieuse, puisqu’elle vise notre ami Stéphane Hessel, 92 ans, ambassadeur de France et rescapé du camp de concentration nazi de Buchenwald.
Près d’une centaine de militants des droits du peuple palestinien, venus de Bordeaux et d’ailleurs, étaient présents dans la salle du tribunal pour faire savoir à qui de droit que Sakina, membre d’une section locale de la Ligue des Droits de l’Homme (LDH) n’était pas seule, et qu’ils étaient pleinement solidaires de son action.
Et Sakina en eut à certains moments besoin, de ce renfort. Non pas pour s’expliquer sur son comportement et ridiculiser les accusations de haine raciale, ce qu’elle fit facilement à la barre. Mais plutôt pour faire face à des attaques vicieuses émanant des avocats des parties civiles (Goldnadel, Markovic, Dahan).
Ces derniers, oublieux du fait qu’ils sont, eux aussi, issus d’une immigration en France récente, ont ainsi fait des tentatives répétées pour insinuer le doute sur l’identité même de Sakina, et la faire passer pour une faussaire. Née Khimoun, fille d’immigrants algériens, Sakina a en effet des papiers d’identité et d’état-civil comportant une série d’incohérences, fruit amer des erreurs d’écritures commises par une administration française historiquement laxiste avec ses citoyens de second rang. Des centaines de milliers, sinon des millions de Français issus de l’immigration sont régulièrement confrontés à des telles situations.
Au bout d’un certain temps, ulcérée d’entendre les Dahan et Markovic, ainsi que la procureure, refuser à Sakina jusqu’à son nom d’épouse (Arnaud), la salle fit entendre une saine colère, des cris de « raciste ! » fusant des travées du public. Touchée au vif, la procureure finit par comprendre, et s’adressera dorénavant à « Mme Sakina Arnaud », comme c’est tout simplement son nom.
M° Antoine Comte, l’un des deux avocats de Sakina avec M° Raymond Blet, discuta tout d’abord la légalité même de l’article de loi utilisé pour la mise en examen (article 24 alinéa 8 de la loi sur la presse) au regard de la Constitution et de son socle qu’est la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789. Une disposition législative récente permet en effet de poser au tribunal une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC), l’obligeant, s’il accepte le bienfondé de la requête, à transmettre la question à l’échelon supérieur de la magistrature, avant d’aborder l’affaire proprement dite (l’affaire Sakina). La présidente du tribunal a rejeté cette requête de transmission préalable, disant qu’elle y répondrait en même temps que sera rendu le jugement lui-même sur l’autocollant, le 22 octobre prochain. La défense pourra donc être amenée à former elle-même un pourvoi devant la Cour de Cassation.
Pour le reste, on retiendra de cette audience :
• le fait que Me Comte ait souligné que l’atmosphère était d’autant plus 'lourde' à cette audience que les juges avaient reçu des consignes du gouvernement, et que leur indépendance était donc mise en cause
• le démontage pièce par pièce du jugement aberrant de première instance, par les deux avocats, Mes Raymond Blet et Antoine Comte : jugement où il était par exemple écrit que l’expression « Boycott Apartheid Israël » avait pour objet, rien que ça, d’instaurer l’apartheid en Israël ! ;
• le témoignage de la députée européenne Nicole Kiil-Nielsen, qui remit bien à sa place le provocateur Goldnadel. Ce dernier s’était avisé de chercher des noises à Nicole à propos du désormais célèbre T-Shirt de couleur verte « Palestine Vivra ! Boycott Israël ». Nicole Kiil-Nielsen lui répondit qu’en matière de T-Shirts, alors oui, elle en avait bien vu, pour sa part, des spécimens incitant à la haine et au meurtre raciste : ceux dont raffole la soldatesque israélienne, en vente dans les boutiques branchées de Tel-Aviv, où l’on voit une femme palestinienne et son bébé transpercés par un tir sous le titre « Une balle, deux Palestiniens éliminés ».
• le témoignage de Maurice Rajsfus, rescapé du génocide dont les parents ont été assassinés à Auschwitz. Ecrivain, historien de la participation de l’Etat français au génocide des Juifs et aussi des crimes coloniaux de la France, Président de l’Observatoire des Libertés Publiques, Rajsfus insista notamment sur la fraude qui consiste, pour les avocats du terrorisme israélien, à exploiter la mémoire du génocide au service de leur sale besogne.
• Un mot enfin sur Gilles-William Goldnadel, partie civile au procès de Sakina pour son association Avocats Sans Frontières, l’une des casquettes qu’il cumule avec celles de Président de l’association France-Israël et de membre de la direction du CRIF. Goldnadel y alla de son traditionnel éructation sur l’antisémitisme des « islamo-gauchistes » dans cette salle, mais quand il aborda le thème de la « violence », Antoine Comte lui rappela qu’en matière de violence, Goldnadel ferait bien d’être plus discret, lui, le défenseur des fascistes du Bétar et de la LDJ, auteurs de multiples agressions, dont celle de la Librairie Résistances à Paris en juillet 2009, où des milliers de livres furent systématiquement détruits. Penaud, Goldnadel retourna s’asseoir.
Compte-rendu de Sud-Ouest
Par Florence Moreau
« Boycott apartheid Israël » : La cour pour tribune
Audience surchauffée, hier, devant la cour d’appel, pour le procès de Saquina Arnaud, jugée pour provocation à la discrimination nationale et raciale.
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