lundi 17 septembre 2012

L'effet négatif d'un pesticide sur les nourrissons antillais


L'exposition prénatale au chlordécone, un pesticide utilisé pendant plus de 20 ans aux Antilles françaises, semble avoir un impact négatif sur le développement des nourrissons, selon une étude de l'Inserm.

L'étude, publiée dans la revue spécialisée Environnemental Research, montre que l'exposition au chlordécone prénatale et --de façon moins significative, post-natale par le biais de l'alimentation--, est associée à des effets négatifs sur le développement cognitif et moteur des nourrissons. Toutefois ces effets ne sont pas confirmés pour les enfants plus âgés pour lesquels l'étude se poursuit, selon l'Inserm. L'étude concerne un groupe de 1.042 femmes suivies avec leurs enfants depuis leur grossesse qui a eu lieu au cours de la période 2005-2007. Les enfants (153) ont été suivis jusqu'à l'âge de 7 mois.

Le chlordécone a été largement utilisé de 1972 à 1993 (date de son interdiction) aux Antilles françaises dans les plantations de bananes aux Antilles pour lutter contre le charançon du bananier. Cette utilisation massive, et son caractère persistant dans l'environnement, ont entraîné une pollution permanente des sols et une contamination de la population.

Le chlordécone, aujourd'hui considéré comme perturbateur endocrinien, neurotoxique, est classé cancérogène possible pour l'homme par l'OMS. Un perturbateur endocrinien classé cancérogène possible pour l'homme L'équipe dirigée par Sylvaine Cordier (Rennes) et Luc Multigner (Pointe-à-Pitre) a collaboré avec des chercheurs québécois, belges et américains pour cette étude d'impact de l'exposition au chlordécone sur le développement cognitif, visuel et moteur de très jeunes enfants de femmes et d'enfants en Guadeloupe.

L'exposition prénatale au chlordécone a été estimée par son dosage sanguin dans le sang du cordon. L'exposition post-natale a été estimée par dosage dans le lait maternel ainsi que par la fréquence de consommation de denrées alimentaires susceptibles d'être contaminées par le chlordécone. "L'exposition prénatale au chlordécone a été retrouvée associée de manière significative avec une réduction du score de préférence visuelle pour la nouveauté ainsi qu'à un faible score" à un test de "motricité fine" (pour saisir des objets). L'exposition postnatale, estimée par la consommation de denrées alimentaires contaminées, est "associée", mais "à la limite de la signification statistique", à un réduction des scores à des tests visuels (de mémoire et de préférence pour la nouveauté).

Par contre, l'exposition postnatale par l'allaitement "n'apparaît associée à aucune modification du développement psychomoteur", constatent les chercheurs. Basés sur un petit nombre d'enfants, ces observations "ne traduisent pas de troubles graves". Elles sont néanmoins à rapprocher de particularités décrites chez des adultes exposés professionnellement au pesticide "et caractérisées par un appauvrissement de la mémoire à court terme et par la présence de tremblements", selon les chercheurs.

Reste à savoir si les anomalies relevées sont annonciatrices de troubles permanents à un âge plus avancé. Pour les auteurs, "seul le suivi des enfants au cours des années à venir permettra de répondre à ces interrogations". Les enfants seront à cet effet suivis jusqu'à l'âge de 7 ans.

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