L’année 2012, du début à la fin est ponctuée de scandales et de dossiers obscurs impliquant, à un niveau ou un autre, l’administration politique de Michel Joseph Martelly, a observé l’agence en ligne AlterPresse.
Chaque scandale, qui a éclaté, reflète l’image d’un État déliquescent, où immoralité et corruption se conjuguent avec amateurisme.
L’année s’ouvre (dès le 3 janvier) avec les déclarations, sur les ondes de stations de radio de Port-au-Prince, du sénateur Jean-Charles Moïse révélant que le chef de l’État, Michel Joseph Martelly, 3 ministres du gouvernement de Garry Conille et un secrétaire d’État détiennent la nationalité étrangère.
La république d’Haïti termine l’année 2012 avec la retentissante accusation de crime de viol, portée contre le président du conseil électoral contesté, Josué Pierre-Louis, par sa subordonnée, une jeune femme de 25 ans, Marie Danielle Bernadin.
Josué Pierre-Louis fut ministre de la justice, conseiller du président et ancien secrétaire du palais national. Il est réputé très proche du président Martelly.
Ikenson Edumé, frère de Josué Pierre-Louis profère de graves menaces contre le juge instructeur en charge du dossier, le magistrat Joseph Jeudilien Fanfan.
Il ne se passe pas plus de deux mois avant que dénonciations et éclaboussures, relayées par une presse à l’affut du sensationnel, ne fassent point des tollés dans le pays.
Martelly et son premier ministre d’alors, Garry Conille, ne s’accordent pas sur la diligence d’une enquête sur des contrats douteux, passés sous le gouvernement de Jean Max Bellerive (conseiller du chef de l’État) dans lesquels « les intérêts de l’État ne seraient pas suffisamment protégés ».
Une investigation d’une journaliste dominicaine, Nuria Peira, révèle des sources de financement occultes de la campagne de Michel Martelly et de Mirlande Manigat par un sénateur dominicain « peu catholique », Félix Ramon Baustista Rosario, Pdg de compagnies de construction ayant gagné des appels d’offres en dehors des normes.
Bien entendu, l’équipe de la présidence en Haïti dément.
Des voix se sont élevées pour dénoncer une possible gestion illégale des fonds de l’État par la famille présidentielle.
Deux avocats, Newton St-Juste et André Michel produisent une dénonciation contre Sophia Martelly, épouse du président, et leur fils Olivier Martelly. Une grande agitation est faite, dans la presse surtout, sur la question.
Me Jean Renel Sénatus, commissaire du gouvernement d’alors, classera le dossier sans suite. A sa révocation cavalière par son ministre de tutelle, celui de la justice, Jean Renel Sanon, Sénatus affirmera, devant le sénat, que le gouvernement lui a exigé l’arrestation des deux avocats.
Le ministre Sanon a également été indexé comme étant lié au proxénétisme, au détournement de mineures et au trafic de stupéfiants.
Malgré la mise en place du conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj), la justice haïtienne semble être mise sous coupe réglée.
Le 9 octobre 2012, cet organe est obligé de revenir sur le précédent choix de ses trois représentants au conseil électoral permanent.
Des conseillers ont dénoncé la procédure ayant abouti à la sélection des premiers représentants, réputés valets de l’exécutif.
Des juges continuent à être nommés de façon jugée irrégulière dans le système judiciaire.
Des organisations de défense des droits humains se sont montrées scandalisées par la libération du conseiller politique du chef de l’État, Calixte Valentin, impliqué dans l’assassinat d’un jeune commerçant, Octanol Derissaint, à Fonds-Parisien.
Un juge aurait été nommé spécialement pour procéder à cette libération.
Au parquet de Port-au-Prince, une valse de commissaires de gouvernement a été observée. Un commissaire a même occupé ce poste durant moins de 24 heures.
D’un autre côté, les voyages privés et de prétendus per diem faramineux sont sévèrement critiqués.
Les programmes sociaux « ti manman cheri », « kore etidyan » sont pointés du doigt, en ce sens que l’État haïtien serait en collusion avec la compagnie de téléphonie mobile Digicel (qui a fait l’acquisition de Voilà).
Certaines organisations d’universitaires se sont demandé si « le gouvernement n’est pas responsable de la promotion des produits Digicel ? »
Après le passage du cyclone Sandy, le gouvernement s’est trouvé dans ses petits souliers pour présenter un rapport au sénat sur les 5 milliards de gourdes (US $ 1.00 = 43.00 gourdes ; 1 euro = 60.00 gourdes aujourd’hui), décaissées pendant la période d’urgence.
Aussi, des sénateurs, dont Annick François Joseph et Jean-Charles Moïse se sont-ils mis en colère en traitant le premier ministre d’être « domestique de la communauté internationale et un anti-nationaliste ».
Le riche homme d’affaires Clifford Brandt, chef d’un puissant réseau de malfaiteurs et de kidnappeurs, a défrayé la chronique. Des proches du chef de l’État, dont le responsable du Cat Team (corps de sécurité d’élite siégeant au Palais national), seraient membres du réseau.
A rappeler que le réseau national de défense de droits humains (Rnddh), dans une lettre adressée au chef de l’État, a attiré son attention sur la présence d’éléments mafieux dans son entourage. Quasiment tous ont été nommés à des postes de responsabilités dans l’appareil étatique.
Alors, au rythme que les scandales, les dénonciations et les dossiers suspects se sont succédé, au cours de l’année 2012, des observateurs se sont questionnés sur le sens et la signification en communication politique de ces données.
Selon des spécialistes de la communication politique, le pouvoir démontre une grande capacité à appliquer la théorie de « l’effet paravent », évoqué par l’ancien directeur du mensuel « monde diplomatique » (1990-2008) dans son livre « Tyrannie de la communication ».
On parle d’effet paravent quand une information occulte une autre. Généralement, cette stratégie est utilisée par les pouvoirs publics pour détourner l’attention des citoyennes et citoyens sur des informations fondamentales.
Pour certains, la seconde information, qui vient faire ombrage à la première, est, en général, fabriquée de toutes pièces.
Était-ce de « l’effet paravent » en Haïti, en 2012, ou tout simplement le règne de l’incompétence, de l’immoralité et de la corruption ?
Edner Fils Décime
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